Dans les années 1890, le médecin William Coley a découvert que des patients atteints de cancer présentaient une régression tumorale après avoir contracté une infection bactérienne. Cette découverte a conduit à l’utilisation d’élixirs bactériens, connus sous le nom de toxines de Coley, pour traiter le cancer. Cependant, en raison de problèmes de sécurité et de l’avènement de la radiothérapie, ces traitements ont été abandonnés.
Au fil des décennies, les avancées en immunologie, en microbiologie et en biologie synthétique ont ravivé l’intérêt pour les microbes en tant que thérapies contre le cancer. Dans un article publié dans Science, des chercheurs ont conçu des probiotiques capables de coloniser les tumeurs et de guider les cellules T modifiées vers le site du cancer. Cette nouvelle plateforme montre que les bactéries modifiées peuvent non seulement améliorer l’efficacité des immunothérapies existantes contre les tumeurs solides, mais elle met également en évidence le potentiel plus large des médicaments vivants.
Le microenvironnement des tumeurs solides est un écosystème hostile, mais les bactéries peuvent y survivre en évitant le système immunitaire. Les chercheurs travaillent donc sur la modification du génome bactérien pour réduire la virulence et la toxicité. Ils utilisent également la biologie synthétique pour concevoir des solutions plus ciblées et spécifiques aux tumeurs.
Les chercheurs ont développé une souche probiotique d’Escherichia coli équipée d’un circuit génétique qui déclenche une lyse synchronisée lorsque les bactéries atteignent un seuil de densité de population. Une fois ce seuil atteint, les bactéries libèrent des antigènes synthétiques qui se fixent spécifiquement aux tumeurs. Cette approche permet de cibler spécifiquement les tumeurs solides, qui sont traditionnellement difficiles à traiter avec les thérapies existantes.
Les chercheurs ont testé leur système probiotique CAR en laboratoire sur différentes lignées de cellules cancéreuses humaines et ont observé une spécificité et une cytotoxicité accrues par rapport aux systèmes dépourvus de l’étiquette GFP. Ils ont ensuite testé leur système sur des souris porteuses de tumeurs et ont observé une inhibition de la croissance tumorale ainsi qu’une activation accrue des lymphocytes T.
L’une des grandes forces de ce système est sa modularité. En modifiant le domaine de liaison à l’antigène, il est possible de cibler différentes tumeurs et antigènes spécifiques. De plus, les bactéries elles-mêmes peuvent stimuler le système immunitaire, ce qui rend le traitement encore plus efficace.
Les chercheurs espèrent que cette approche combinant probiotiques et cellules CAR T pourra être utilisée pour traiter les tumeurs solides chez les patients. Cependant, des recherches supplémentaires seront nécessaires pour évaluer l’efficacité et la sécurité de cette nouvelle approche thérapeutique.
En conclusion, les progrès en biologie synthétique et en immunothérapie ont ouvert de nouvelles possibilités pour le traitement des tumeurs solides. Les probiotiques modifiés peuvent coloniser les tumeurs et guider les cellules immunitaires vers le site du cancer, améliorant ainsi l’efficacité des traitements existants. Cette approche prometteuse ouvre la voie à de nouvelles thérapies contre le cancer.
Source : https://www.the-scientist.com/news/bugs-as-drugs-to-boost-cancer-therapy-71592