Dans une nouvelle étude publiée dans PLOS One, le microbiologiste Gary Toranzos et son équipe de l’Université de Porto Rico ont utilisé l’ADN coprolite pour en apprendre davantage sur les peuples Huecoïde et Saladoïde, deux groupes indigènes précolombiens qui ont vécu sur l’île de Vieques à Porto Rico pendant plus d’un millénaire. Les coprolites sont des excréments fossilisés qui, bien qu’ils ressemblent à de simples roches pâles, contiennent des informations précieuses sur les régimes alimentaires et les modes de vie anciens.
Gary Toranzos, qui étudie les microbes et le matériel génétique présents dans les cours d’eau modernes et les coprolites anciens, s’est intéressé aux coprolites il y a plus de dix ans. Au début, il était sceptique quant à la possibilité de trouver de l’ADN ancien dans le climat tropical de Porto Rico. Cependant, il a découvert que l’ADN pouvait survivre plus longtemps que prévu dans des environnements humides.
Dans une précédente étude, le groupe de recherche a étudié les bactéries, les champignons et les archées présents dans les intestins des individus décédés depuis longtemps. Ils ont constaté que les peuples Huecoïde et Saladoïde étaient en réalité des groupes ethniques distincts, et non de simples sous-cultures. Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont examiné les plantes et les champignons associés aux plantes dans les coprolites afin de déterminer le régime alimentaire de ces peuples anciens.
Les récits écrits par des colons espagnols suggèrent que les peuples autochtones des îles des Caraïbes se nourrissaient principalement de manioc. Cependant, les coprolites racontent une histoire différente, révélant une grande variété de plantes comestibles, telles que le maïs, la patate douce, le piment, la tomate, l’arachide et la papaye. Les chercheurs n’ont trouvé aucune trace de manioc dans les coprolites, ce qui pourrait s’expliquer par la nécessité d’un traitement approfondi pour éliminer les composés toxiques présents dans la variété amère de manioc présente sur les îles.
Les coprolites ont également révélé la présence de plantes non alimentaires, telles que le tabac et le coton. Bien que le tabac soit traditionnellement utilisé par les peuples autochtones des Amériques depuis des milliers d’années, la présence de coton dans les coprolites était plus difficile à expliquer. Une explication possible est que les femmes utilisaient leur salive pour mouiller les fils de coton lors du tissage, ce qui aurait pu entraîner l’ingestion de fibres de coton chargées d’ADN.
Toranzos souligne que la diversité des plantes consommées par ces premiers habitants de Porto Rico pourrait être encore plus grande que ce que suggère l’étude, car les bases de données de séquences d’ADN végétal se concentrent principalement sur les plantes d’importance commerciale aujourd’hui.
En résumé, l’étude de l’ADN coprolite permet de retracer les pratiques alimentaires et les modes de vie des peuples anciens. Les coprolites des peuples Huecoïde et Saladoïde de Porto Rico ont révélé une grande diversité de plantes comestibles, ainsi que la présence de plantes non alimentaires. Ces découvertes remettent en question les idées préconçues sur les régimes alimentaires des peuples anciens et mettent en évidence leur sophistication culturelle.
Source : https://www.the-scientist.com/news/clues-in-the-coprolites-71581