Le médicament Pluvicto (lutécium-177 vipivotide tétraxetan) développé par Novartis est désormais pris en charge par l’assurance maladie française pour traiter les patients atteints d’une forme particulièrement avancée de cancer de la prostate. Cette prise en charge concerne spécifiquement les hommes dont la maladie s’est propagée dans l’organisme sous forme de métastases et qui présente une résistance aux traitements hormonaux classiques, après avoir déjà bénéficié d’une hormonothérapie et d’une chimiothérapie à base de taxanes.
Une approche thérapeutique révolutionnaire
Pluvicto représente une véritable innovation dans le traitement du cancer de la prostate grâce à son mécanisme d’action unique qui exploite les principes de la médecine nucléaire. Ce médicament associe ingénieusement le lutécium-177, un élément radioactif émetteur de rayonnements bêta, à une petite molécule capable de reconnaître et de se lier avec une très forte affinité à l’antigène membranaire spécifique de la prostate, plus communément appelé PSMA. Cette protéine particulière présente l’avantage d’être exprimée chez plus de 90% des patients atteints d’un cancer de la prostate, ce qui en fait une cible thérapeutique de choix.
Le principe de fonctionnement repose sur ce qu’on appelle la radiothérapie interne vectorisée. Une fois injecté dans l’organisme, Pluvicto circule dans le sang jusqu’à ce qu’il rencontre les cellules cancéreuses exprimant le PSMA. La molécule se fixe alors spécifiquement sur ces cellules, permettant au lutécium-177 de délivrer un rayonnement thérapeutique directement au cœur des tumeurs. Ces radiations endommagent l’ADN des cellules cancéreuses, provoquant leur mort programmée tout en préservant au maximum les tissus sains environnants. Cette approche ciblée constitue un avantage majeur par rapport aux traitements conventionnels qui affectent souvent l’ensemble de l’organisme.
Des résultats cliniques convaincants
L’efficacité de Pluvicto a été rigoureusement établie grâce à l’étude clinique internationale VISION, un essai de phase 3 d’envergure qui a inclus des patients souffrant d’un cancer de la prostate métastatique résistant à la castration. Ces patients avaient tous été préalablement traités avec au moins un inhibiteur de la voie des récepteurs androgéniques et un ou deux protocoles de chimiothérapie par taxanes, et présentaient des examens d’imagerie PSMA positifs confirmant l’expression de cette protéine par leurs cellules cancéreuses.
L’étude, menée de juin 2018 à octobre 2019, a permis de randomiser 831 patients parmi les 1179 initialement sélectionnés. Les participants ont été répartis de manière aléatoire selon un rapport de 2 pour 1 entre deux groupes : le premier recevait Pluvicto à la dose de 7,4 GBq toutes les six semaines pendant quatre à six cycles en association avec le traitement standard autorisé, tandis que le second groupe ne bénéficiait que du traitement standard seul. Il est important de préciser que ce traitement standard excluait délibérément la chimiothérapie, l’immunothérapie, le radium-223 et tout médicament expérimental.
Après un suivi médian de près de 21 mois, les résultats se sont révélés particulièrement encourageants. Pluvicto associé au traitement standard a permis de prolonger significativement la survie sans progression basée sur l’imagerie, avec une médiane de 8,7 mois contre seulement 3,4 mois pour le traitement standard seul. Cette amélioration représente une réduction de 60% du risque de progression ou de décès. De manière encore plus remarquable, la survie globale a également été significativement prolongée, passant d’une médiane de 11,3 mois à 15,3 mois, soit un gain de 4 mois de vie supplémentaires avec une réduction de 38% du risque de décès.
L’ensemble des critères d’évaluation secondaires de l’étude ont confirmé la supériorité de Pluvicto. En termes de tolérance, bien que l’incidence des événements indésirables de grade 3 ou plus ait été plus élevée avec Pluvicto qu’avec le traitement standard seul (52,7% contre 38,0%), la qualité de vie des patients n’a pas été significativement affectée, ce qui rend le profil de tolérance acceptable au regard des bénéfices apportés.
Modalités pratiques d’administration
En pratique clinique, Pluvicto s’administre par voie intraveineuse selon un protocole bien défini. Le traitement est donné en association avec une suppression androgénique et peut être utilisé avec ou sans hormonothérapie inhibitrice de la voie des androgènes selon le contexte clinique de chaque patient. Le schéma thérapeutique recommandé prévoit l’administration de 7 400 MBq par perfusion intraveineuse toutes les six semaines, avec un maximum de six doses au total. Ce traitement peut être interrompu prématurément en cas de progression de la maladie ou si des effets indésirables inacceptables surviennent.
Cette prise en charge par l’assurance maladie française représente une avancée majeure pour les patients atteints de cette forme avancée de cancer de la prostate, leur offrant une nouvelle option thérapeutique scientifiquement validée dans une situation où les alternatives restent limitées.